Littérature De jeunes migrants peuplent les huit contes réunis sous le titre Avers. J. M. G. Le Clézio nous en révèle la genèse, qui remonte à sa propre ...
Lorsqu’ils reviennent à la maison avec un dictionnaire ou le livre de Gibran, j’imagine que l’un d’eux va peut-être lire les phrases écrites, essayer de comprendre ce que ça signifie, prendre confiance en lui-même. Il n’y a plus, aujourd’hui, ce sentiment de responsabilité des humains les uns envers les autres, de la part de ceux qui ont tout envers ceux qui n’ont rien. Je donne des dictionnaires, je propose des textes un peu compliqués, comme le Prophète, de Khalil Gibran. Il n’y a pas un livre chez eux, même pas une Bible. Quand ils en voient un, ils mettent en marche leur troupeau de dromadaires, car là-bas il y a de la pluie, donc de l’eau. Elle encourageait les enfants fugitifs à « patauger dans l’eau » des marécages pour échapper aux chasseurs et à l’odorat des chiens féroces qui les pistaient. Avec des amis nous avons créé, à l’île Maurice, une association qui distribue des livres dans les écoles créoles. Grâce à la littérature, je pouvais entrer dans la peau d’un enfant de mon âge, jeté dans la rue et qui devait s’endurcir. Le Clézio nous en révèle la genèse, qui remonte à sa propre enfance fortement imprégnée de la culture mauricienne, du goût des langues et de la lecture. Notre revers, c’est ce que les gens perçoivent de négatif dans notre personnalité, dans notre vie. Le Clézio (Le Procès-verbal, Désert, l’Africain…) couronné en 2008 par le prix Nobel de littérature, vient de s’ajouter Avers (Gallimard), qu’il définit comme un recueil de « nouvelles des indésirables ». Je dédie ce titre aux personnages de ces contes, y compris à ceux de contes que je n’ai pas écrits…
Huit nouvelles lumineuses de J.M.G. Le Clézio mettent en scène des personnages des marges refusant de se soumettre à l'arbitraire. La fiction comme terreau ...
« Je l’écoute et je sais que c’est la voix de mon grand-père qui parle par sa gorge, cette voix grave et chantante, qui dit le seul poème créole que j’aie jamais connu, le poème qui vient du fond des âges, du fond de la ravine où les travailleurs noirs sont enfermés le soir, du fond de la gorge qui font téter leurs bébés, et je sais que c’est ce lait que mon grand-père a bu dans son enfance, ce lait blanc de la nénéne noire, qu’il a bu avec les paroles du chant mélancolique des serviteurs et des servantes. Des nouvelles des indésirables » de J.M.G. Il faut toute l’exigence de la littérature pour révéler la force de l’action. Ses récits, plus vrais que réels, sont remplis de « la forêt immense, mystérieuse, captivante, capturante » et résonnent de musiques métissées, de chants venus d’Afrique et du Panama, de berceuses créoles. On y plonge par la merveilleuse histoire de Maureez Samson, orpheline de la baie Malgache à la conquête de son affranchissement. La fiction comme terreau de l’action.
Commençons par la fin. La quatrième de couverture n'est pas une sorte de «pitch» destiné à attirer le chaland, mais une profession de foi.
Cette pièce d’or est le seul lien qui la rattache à son père. Le sort que je réserve à mes personnages n’est guère enviable, parce que ce sont des indésirables, et mon objectif est de faire naître chez le lecteur un sentiment de révolte face à l’injustice de ce qui leur arrive», écrit La première nouvelle est coiffée du titre Avers, qui est aussi celui du recueil.
Il a suffi que la dernière lettre peinte sur le bateau dégoutte et se transforme en Z pour que Maureen devienne Maureez. C'est l'épisode inaugural du destin ...
Maureez est l’une de ces silhouettes qui échappent aux règles de la société, ouvrant ce recueil de nouvelles attentif aux « indésirables » — ceux que, de par le monde, on regarde sans les voir. Ni le pensionnat dans un couvent, ni le succès que remporte sa voix magnifique quand elle interprète des chants de révolte d’esclaves, des litanies de Pergolèse ou des airs de Purcell et de Schubert ne la lieront à qui que ce soit. Maltraitée par sa belle-mère et menacée par le nouveau compagnon de celle-ci, Maureez s’enfuit dans la montagne, s’invente une amie imaginaire, Bella, lui parle dans une langue inconnue et chante.
A l'oeuvre considérable du romancier JMG Le Clézio (Les Minutes, Désert, l'Africain...) couronné en 2008 par le prix Nobel de littérature, ...
Il n’y a plus, aujourd’hui, ce sentiment de responsabilité des humains les uns envers les autres, de la part de ceux qui ont tout envers ceux qui n’ont rien. Elle a encouragé les enfants fugueurs à « pataugent dans l’eau » marécages pour échapper aux chasseurs et à l’odeur des chiens féroces qui les traquaient. Il n’y a pas un livre avec eux, pas même une Bible. Quand ils rentrent chez eux avec un dictionnaire ou le livre de Gibran, j’imagine que l’un d’eux va peut-être lire les phrases écrites, essayer de comprendre ce que ça veut dire, prendre confiance en lui. Je voulais parler des enfants qui, sans comprendre de quoi il s’agissait, ont fui la guerre. Avec des amis nous avons créé, à Maurice, une association qui distribue des livres dans les écoles créoles. Grâce à la littérature, j’ai pu me mettre dans la peau d’un enfant de mon âge, jeté à la rue et qui avait besoin de s’endurcir. Un des siens a traversé les marais, d’où sa célèbre chanson, pataugent dans l’eau. Il y a eu des moments où soit la religion, soit la politique, soit une certaine moralité ont essayé d’améliorer les choses. Il y avait des livres de tous côtés, et parmi eux le Quichotte dans une édition du XIXe siècle et, sans nom d’auteur, le Lazarillo par Tormes, qui raconte l’histoire d’un enfant qui devient guide pour un aveugle en Espagne à la fin du XVIe siècle, début du XVIIe siècle. En chaque personne il y a un revers et un revers. Notre revers est ce que les gens perçoivent comme négatif dans notre personnalité, dans notre vie.