L'entraineur de l'équipe de France est devenu un professionnel de la communication par son art de l'esquive et de la tautologie. Florilège.
Extraits choisis: «un match international, ça reste un match international», ou «il est comme il est», (à propos du milieu de terrain Adrien Rabiot). «C’était un homme de cœur/Insatiable de gloire/Lorsqu’il était le vainqueur/Il remportait la victoire.» Sur le modèle de la chanson, écrite au XVIIIe siècle par Bernard de La Monnoye, l’entraîneur scande à la cantonade: «C’est une autre compétition qui commence, pas la même que la première», «ils vont jouer cette qualification à fond. Avant la rencontre opposant les Bleus à la Tunisie le 30 novembre, pas question de parler de «fatigue», mais plutôt de ce qui peut y conduire: «Il faut tenir compte qu’il y a eu deux matchs en quatre jours, et non pas en cinq jours. «De par le positionnement de certains joueurs», «de par l’objectif commun, ça se passe bien»… Aussi, se permet-il de répondre à une question sur la nouvelle génération de footballeurs par un commentaire personnel: «C’est gentil de me rajeunir mais à l’époque je n’étais pas jeune.» Ou d’assurer le spectacle lorsqu’un problème lié à la traduction d’une question survient: «Allô?… Je suis dans un grand moment de solitude», dit-il face aux rires de la salle. Naguère parodié pour ses tics de langage (qui ne connaît le fameux «tant sur le plan tactique que sur le plan technique» des Guignols de l’info?), Deschamps a su façonner sa rhétorique pour aboutir à la maîtrise d’une langue quasi-politique, caractérisé par un art parfait de fermer les angles, de neutraliser toute velléité d’indiscrétion. Pour cela, quoi de mieux que de laisser ses interlocuteurs, fréquemment impliqués dans ses réponses, le faire à sa place? «Libre à vous d’ouvrir les débats que vous voulez», «je vous laisse l’initiative de faire votre propre analyse», ou encore «si vous pensez que c’est ce qu’il y a de mieux…», autant d’antiphrases qui, sous couvert d’invitations cordiales, permettent à Deschamps de s’échapper. Il refuse cette dernière au profit de la digression, sur laquelle repose toute son éloquence. Devant un parterre de journalistes venus des quatre coins du monde, Didier Deschamps est désormais parfaitement rompu à l’exercice de la conférence de presse. Je ne suis pas là pour prédire», affirmait-il, pragmatique, le 3 décembre dernier.